« Noxarhya, ma chérie.. » Elle était faible, elle était pâle. Ses grands yeux gris semblaient éteints, ils avaient perdu l'éclat de bonheur qu'ils avaient, autrefois. La jeune adolescente s'est approchée du lit de sa mère, les cheveux retombant sur son visage, cachant les larmes d'angoisse. Il ne restait plus qu'elle, les Drozdov étaient finis. Le père était décédé deux années auparavant, dans une stupide querelle, excessif comme il était, ça avait dégénéré et il n'en avait pas réchappé, au grand dam de son épouse qui ne s'en remettait pas. Noxharya voyait donc sa famille sombrer, le manoir tomber en ruine, dans le calme de la nuit Londonienne, dans le silence qui annonce une fin certaine et malheureuse. « Oui.. » Anastasie a esquissé un fade sourire en prenant la main de sa fille, serrant doucement ses doigts. « Il y a une clef, dans le secrétaire de la bibliothèque. Elle ouvre notre coffre. » Du haut de ses treize ans, presque quatorze, Nox commençait à comprendre vers quoi la conversation glissait. Elle n'a pas osé protester, bien qu'elle aurait préféré ne jamais avoir affaire à la réalité, la douloureuse vérité. « Ton père désirait à tous prix préserver la pureté de notre lignée.. je voudrais que tu respectes ce choix, même si je ne l'approuve pas entièrement. Me promets-tu de faire les bons choix.. ? » Elle s'est mordue l'intérieur de la joue, cherchant à réprimer ses larmes. Non, Noxharya ne pouvait pas connaître tous les détails, elle ne pouvait pas se douter que cette promesse serait lourde de conséquences.. elle était loin de penser à ce que pouvait contenir le testament, alors elle a accepté. Elle a juré de sauver l'honneur des Drozdov, quoi qu'il lui en coûte.

« Vous descendez peut-être d'une noble famille mais ici vous serez traitée comme n'importe quelle orpheline. » Noxharya subissait en silence. L'endroit était froid, triste, morne, loin des dorures de sa chambre, loin du parfum de pêche du jardin familial. Elle n'avait avec elle qu'une valise remplie de quelques vêtements et de papiers de la plus haute importance pour son avenir. Elle allait fêter ses quatorze ans, en l'absence de famille. Sa mère avait rendu l'âme plusieurs jours auparavant et n'étant pas majeure, l'héritage de Nox dormait dans des coffres, en Russie et en Angleterre. Elle en était réduite à côtoyer les plus basses classes de la société. Peut-être n'aurait-elle pas été celle que l'on connaît aujourd'hui si elle n'avait pas supporté cette humiliation, peut-être ne se serait-elle pas battue pour devenir une jeune femme respectable. A son entrée à Poudlard, elle s'est forgée un objectif, non seulement elle sauverait l'honneur de sa famille, mais elle réussirait sa vie, comme jamais ses ancêtres ne l'avait fait. L'ambition domina donc tous les traits de caractère, et si le choixpeau semble s'interroger, hésiter entre le vert et le bleu, c'est le premier qu'il sélectionna, sans doute parce qu'elle portait en son coeur la rage de gagner, quitte à détruire ceux qui l'en empêcheraient. Elle a passé deux années à batailler pour prouver sa valeur, pour faire reconnaître la pureté de son sang, de son nom et de ses idéaux. La douce demoiselle au coeur emporté par les romances des bouquins venait d'être soufflée comme le sable par un vent violent.. elle n'était plus la même et ne le serait plus jamais. La première étape fut réussie, et elle fut enfin autorisée à retrouver le prestige de son enfance.

Il était peut-être froid, et elle bien trop excessive, ils n'en restaient pas moins ses bienfaiteurs. Sans eux, il aurait été nécessaire d'attendre une année de plus avant de goûter à nouveau au plaisir de la richesse, de la douceur. Mieux que quiconque, elle savait apprécier le moelleux d'un matelas ou la bonté d'un être qui ne montre qu'une façade. Peut-être que monsieur Alinovitch n'était pas des plus présent, sans doute que sa femme était étrange, cela n'empêchait pas Noxharya de se comporter au mieux avec eux. Elle avait appris à être fière de son sang, à mépriser les plus faible et à se comporter comme elle l'aurait toujours fait si son père n'était pas mort, si sa mère n'avait pas été trop tolérante. La jeune femme avait gagné en connaissances, extrêmement bonne élève, surtout par soif de réussite, mais elle avait également gagné en beauté. On retenait d'elle son port altier, son allure princière, ses yeux gris acier pailletés de vert et ce sourire en coin qui vous perd entre moquerie et satisfaction. Elle est fière et cela se voit.. mais après tout, n'est-ce pas là une des principales caractéristiques de sa maison ? Elle y a sa place, l'a prouvé, l'a fait valoir. Alors certes, elle n'est pas la mieux intégrée dans la famille de sa cousine, elle n'en reste pas moins heureuse de son sort. Il faut savoir savourer ce que l'on nous offre avant de convoiter une autre situation.

« Crois-tu vraiment que tu possèdes le moindre intérêt à mes yeux ? » Elle était hautaine et prétentieuse, mais Nox était comme cela, on le lui pardonnait, on l'acceptait, ou on la détestait, elle s'en fichait pas mal. Egale à elle-même, elle avait passé son chemin, n'accordant pas une minute de plus de son précieux temps au né-moldu qui lui avait adressé la parole, sur un sujet qu'elle avait déjà oublié. Elle a cependant été stoppée dans sa marche par un visage qui a ravivé un souvenir lointain, un flash la poussant à s'appuyer contre le mur le plus proche. Elle connaissait ces yeux, ses yeux. La jeune femme n'avait jamais remarqué la présence de ce garçon, elle le pensait sang-mêlé et ne s'intéressait donc pas à son cas.. elle se sentait pourtant étrangement attirée vers lui, sur le coup, alors qu'elle sortait de ce mélange d'images confuses. Etait-ce donc cette histoire de vies antérieures ? Elle a balayé l'idée, les émotions d'un revers de la main, déterminée à poursuivre comme si de rien n'était. Elle avait un homme à trouver, un accord à passer, pas une seule seconde à perdre avec ces futilités. Après tout, son existence n'avait qu'un objectif : tenir la promesse de ses treize ans.